Alexandre Kerek

Comment j’ai tué mon premier phoque

Le vieux morse


Comment j’ai tué mon premier phoque


Quand le printemps arrivait, nos gens quittaient le village de Tumanskoïé, comme pour aller nomadiser dans les pâturages d’été, en direction de l’embouchure de la Tymne. C’était l’époque où la horde enfantine en finissait avec l’année scolaire et se retrouvait elle aussi à cet endroit. Qu’il y avait de gaieté ! Toute la journée les gamins jouaient dehors. Que de volatiles il y avait alentour ! La mer était encore prise par les glaces, et les pères allaient y chasser sur leurs traîneaux tirés par des chiens. Chaque jour ils capturaient des veaux marins et des phoques barbus. Les mamans, elles, débitaient les bêtes et faisaient des provisions de graisse dans des baudruches en peau de phoque. De leur coté les anciens veillaient à tenir les barques prêtes pour la chasse au morse. Dès que la banquise se brisait, on mettait les barques à l’eau. D’abord on les essayait : on traversait l’embouchure à la rame ou bien on gagnait les îles, puis on rebroussait chemin. De retour, on examinait les barques, les peaux de morse qui les tendaient, leur ossature, les tolets, les rames, le gouvernail. S’il s’y trouvait la moindre imperfection, on réparait sur-le-champ, car cela aurait pu causer quelque incident en cas de tempête. Ces années-là, notre coopérative utilisait sept barques en peau de morse pour chasser en mer. On pouvait chaque année remplacer les peaux abîmées par des neuves, car chaque année on capturait des bêtes. Le vieux Penevïi excellait à fabriquer ces barques. Il dédoublait les peaux de morses en épaisseur. Quand il en avait terminé avec la charpente d’une barque, il y tendait la peau qu’il fixait avec des courroies. Se servant d’une petite rame, il battait la peau qu’il avait mise quelque temps à sécher, et elle résonnait comme un tambour chamanique. Il la tendait au maximum.

Et voilà que la banquise se brisait. Des vols de canards et de grèbes passaient en grand nombre au-dessus des glaces côtières. Les adolescents, les plus grands des garçons, restaient la nuit sur place tellement ils convoitaient ces volatiles.

- Regardez comme je suis adroit ! criait joyeusement un jeune, tout fier d’avoir abattu un canard.

- Mais nous avons tiré tous les deux ! lui rétorquait un autre.

- Oui, mais j’ai tiré avant toi. Toi, tu as tiré alors qu’il était déjà en train de tomber, lui répliquait le premier.

Chaque jour, débordant de gaieté, nous chassions ainsi le canard jusqu’à la disparition des glaces côtières. Pendant ce temps, les hommes remorquaient leurs barques et les mettaient à l’eau. Ils utilisaient soit des rames, soit des voiles. Quand ils trouvaient de grands blocs de glace, ils accostaient, hissaient les barques sur la glace, les retournaient la quille en l’air contre le vent et les recouvraient avec les voiles. On était là-dessous comme dans une yarangue.

A mon réveil, quand j’étais encore enfant, mon père, avant de partir en mer, me demandait toujours :

- Eh bien, petit, veux-tu aller chasser avec nous ?

- Oh oui, répondais-je avec la plus grande joie.

- Bien, mais d’abord va faire une bonne toilette car tu t’es bien sali. On dirait que tu t’es roulé dans de la cendre. Tu pourrais faire fuir les veaux marins.

Sans perdre un instant je partais en courant vers un petit lac, enlevais ma combinaison en peau de renne, me lavais de fond en comble en toute hâte. Je craignais qu’ils partent sans moi.

- Comme te voilà propre ! Même si tu enlеvais ta combinaison blanche les phoques ne te verraient pas, plaisantait mon père.

Tout au long de ces années, les garçons apprirent à tirer au fusil. Chaque fois qu’on célébrait un rite, on organisait des concours pour nous, les garçons : qui serait le plus adroit au tir. Nous imitions les adultes. Au printemps, avant la fin de l’année scolaire, nous chassions la perdrix et parfois aussi nous ramenions des canards.

Un jour, au petit matin, les chasseurs bien reposés ramaient énergiquement et la barque filait à toute allure. La débâcle commençait et il restait en mer de gros glaçons à proximité. Bientôt notre embarcation alla donner du nez dans un vaste pan de banquise. Nous descendîmes. Après la collation mon père dit aux chasseurs de se disperser. Il me recommanda également de partir chasser dans les environs en restant face au vent. Je n’avais pas l’anorak blanc traditionnel et ma soeur, qui restait dans la barque, me noua son foulard blanc sur la tête.

Le soleil chauffait avec ardeur. Il faisait bon. Dans mon for intérieur je me demandais tout en cheminant pourquoi mon père, sans rien m’expliquer, m’avait recommandé de marcher face au vent. Plusieurs années plus tard je compris que, de la sorte, il est plus facile de s’approcher du gibier, quel qu’il soit. Je m’étais un peu éloigné de la barque quand j’aperçus devant moi une tâche sombre. Je fis halte, m’accroupis et me mis à observer. Un veau marin ! Je me glissai lentement dans sa direction et m’approchai en jetant des coups d’oeil par intermittence. Devant moi, par chance, il y avait des hummocks, tout un amas de congères. C’est pourquoi seule ma tête dépassait. Petit à petit j’étais arrivé à portée de tir. A nouveau je regardai. Le petit phoque dormait face à moi, couché en biais. Je me préparai à tirer, couché sur un hummock. Je pris la bonne visée et attendit qu’il se réveille et lève la tête. Mon coeur battait à tout rompre, à tel point que ma respiration me paraissait brûlante. Bientôt le petit phoque agita ses nageoires et se redressa. Je fis feu sans tarder : il laissa soudain retomber la tête. Je l’observai, pensant que je l’avais peut-être manqué et qu’il avait plongé dans son trou de respiration. Mais non ! Il demeurait immobile. Je finis par me précipiter. Je regardai : il ne bougeait pas. J’avais abattu un phoque, mon premier phoque ! Avec quoi le remorquer jusqu’à la barque ? J’avais vu mon père ramener des phoques à la maison. A son instar je pratiquai une fente dans la lèvre de la bête et y fixai la lanière qui me servait de ceinture ainsi que le foulard de ma soeur. Puis tout heureux je me mis à le traîner sans accorder d’attention aux autres phoques qui s’étaient hissés sur la glace un peu plus loin. Quand j’arrivai à la barque, ma soeur fut toute réjouie. Les hommes aussi revenaient l’un après l’autre en remorquant chacun deux ou trois bêtes.

En rentrant à la maison, mon père se fit attraper par ma mère :

- Pourquoi as-tu emmené cet enfant ? Il n’est absolument pas préparé à la chasse sur la banquise. Et il se promène sans ceinture et sans combinaison !

- Certes, moi aussi je me suis dit qu’il était encore petit et qu’il ne nous serait d’aucune aide. Mais ce matin il a fait une très bonne toilette. Il en était si blanc que le phoque ne l’a pas vu, plaisanta de nouveau mon père. Qu’il se lave donc ainsi, de fond en comble, tous les matins et qu’il demeure aussi adroit qu’il l’a été aujourd’hui.


Кэрэк

Миӈкри тэӈвытку тымэмылёгъак

Ӄитвэю


Миӈкри тэӈвытку тымэмылёгъак


Амӄынкыткытръок мургин рэмкын авыннымнымгыпы Туманскоe ныялгытӄэн, ӄынур анольатынвэты, пэлгэты Тымӈэн. Кэтэм ынкы ӈинӄэгрэт нэмыӄэй ныкэлиткуплыткуӄин, нэмыӄэй нумэкэтӄин пилгык. Ынӈатал-ым колё коргэты нытваӄэн! Ымъылёӈэт нувичвэтӄинэт ӈаргын. Наӄам колё гатле лымынкы. Еп эчимэткэ аӈӄы ыргинэт ытлыгыт ыттъэ нивиниӄинэт. Ӄонпы нымэмылёӄэнат, нунъэлюӄинэт. Ытльат-ым нинээнӈэтӄинэт, нытэмытӄыӈӄинэт пыгпыгчыко. Ынпыначгырык-ым ытвыт нынъетъаӈавӄэнат ытвынконвэты. Эчги нычимэтӄин аӈӄы, ытвыт нынэлкыӄинэт мэмлеты, янор нытааӈӄэнат, ынӄэн-ым тэвыльата рочгэты, мэӈинрин элерэткогты нэквэтӄинэт, ынӄо нынватӄэнат. Пыкирык ярак нытэӈгитэӄин ытвъэт: рэпалгын, ымыльо ыттъымти, тээвъёлгыт, тэвэнаӈат, льытэвэнаӈ. Эвыр мачьаткэвма вальыт, лыгэн ынкэӄэй нытэнкэвӈыӄинэт, ӄэлюӄ-ым аӈӄак ытри арэткочьо ринӈыт, йъарат-ым айгычгэнма. Ынӈингивиткук морыкколхозык ӈэръамытлыӈэн ытвыт, рэпалгъытвыт, ныяаӄэнат аӈӄак гынниӈӈыттык. Эмӄынгивик эӄэрэльыт ытвыкин рэпалгыт нынрымэӄэнат торрэпалга, ӄэлюӄ-ым лыгэн эмӄынгивик гынниӈӈыттыльыт нырыркоӄэнат. Ынантамэнӈычьо тъытвыӈык нитӄин ынпыначгын Пэӈэвйи. Ымы ынан рэпалгын, ытвык яаёлӄыл, лыгэн тэкэм гынунык нэначгатӄэн. Ыттъым ытвыкин тэйкыплыткук Пэӈэвйинэ нинэтиӈуӄин (нэнайпатӄэн) рэпалгын, нэнанъомравӄэн ӈилгэ. Мачкыкватык рэпалгын, ӄагтэвэнаӈата кыплык, ӄынур ярямэл ныпэгляӄэн, ынӄэн-ым энмэн гэлгитэнтиӈулин.

Вынэ-ым вай энмэч гилчимэтгъи аӈӄы. Аны колё туквэк ачьэӄыт, нээмӈыт рэӈамйыльатыӈӈогъат. Аачекыт, ӈинӄэгти мэчынпычьыт талваткэвыӈӈота туквэк этыӈӈогъат рыпэт эмгиинрэтэ галгагты.

- Гъотоӄ! Колё нинэпыткигым! Нэргавӄэн ӄол аачек, ачьэгнаратыльын.

- Ынӄэн-ым нирэмури алымы мытылӄэгнэвын! Ӄутынэ нинивӄин эргавыльын.

- Вынэ гымнан киткит ыттъыёл гэлӄэгнэвлин! Энмэч эрэтыльын гынан ӄэгнэвын! Ныталлыӈыткоӄэн аачек.

Ынӈин гэчевкы амӄынъычо ныгалгаӈыттыӄэнат туквэн талпытагнэты.

Ынӈэнъылёткок-ым ытвыткульэ токвагты нъэмэтӄинэт ытвыт, ынӄо нэлкыӄинэт аӈӄагты. Тэвыльата мэӈинрин тыленэӈэтэ нитӄинэт. Ныльуӄин ыргынан мэйӈыгил, ынкы нымпэӄинэт. Ытвъэт нытиӈуӄин гэлыткынэты, нэнарычгавӄэн калта кытийгыӈӄачагты, тыленэӈэтэ нэнаръэӄэн, лыгэн-ым ӄынур ярано нынъэлӄин.

Ӈинӄэйӄэю вама акватыӈӈок аӈӄагты, гым турыгъевинэӈу ытлыгэ ӄонпы нэнамӈылёӄэн:

- Нэнээн, ымто мурыгрээн ръытвыльэтгъэ?

- Вынэ ии! нылгэкоргавэгым гым.

- Ытръэч-ым янор ӄылгитэӈилгытэкви, йъарат ынӄэн лыгэчарэйпыгъэ, пуйъэтгъи ӄынур, мэмылягтатыткочьо ритгъэ.

Ынкэӄэй лыгэн ныкытгынтакватэгым гытгыӄаеты, ниръытвигым, нилгытэвыльэтигым, наӄам чама ныгагчавэгым, ӄэлюӄ-ым вэчьым нарапэлягым.

- Колё йыӄӄайъым, ымы элгывтычгыка ӄырым мэмыля ынльугыт! Нымӈэлюӄин ытлыгын.

Ынӈингивиткук ымыльо ӈинӄэгти милгэрыткук гэйгулетлинэт. Амӄынмыӈэгыpгын тыляма ӄонпы ӈинӄэйӄэймури ымы нынрачвыӈавморэ чымчагты, нынинэпыткычитэвмури милгэрэ. Ӄынур-ым лыгэн майӈъоравэтльамэл нинмури. Калеткоплыткоӈӈок, кыткытык, колё нырэвымрэвӈыттымури, ымы ӄол нинмури нылгэгалгоморэ.

... Лыгичикинъэ энмэч аӈӄаеквэ кырвэнтольа тэвыльа ытвъэт ныныйӄытчовӄэн. Турчимэтык аӈӄы мэйӈыгилти чымче нытваӄэнат, ынӄэната пэтле мургин ытвъэт мэйӈыгилык иӈыпгъи. Мытымпэмык. Чаёплыткок ытлыгэ гынниӈӈыттыльыт ивнинэт, иӈӄун ытри амманаӈ чычейвынэт. Гым нэмыӄэй иниквъи, иӈӄун кытийгайгыпы чымчагты мэквэтгъэк. Наӄам автычгыкыльэгым ынкъам чакэтта, пэлятыльык ытвык, элгыкычыквын левтык кылтынин, ӄынур энанкычыкватгъэ.

Колё наӄам нъэӄэгнитӄин, номатӄэн. Тыляма, эмӄэлелвынэ нычимгъуйгым, ийъам атэна кытийгайгыпы инэтригъи, наӄам тэнлюгнинъэйвэ инэнтыгъи. Вытку тъэр гивиӈитти галяк чинит тычичеквъэк: кытийгайгыпы имыръэгынник таӈынаймавыӈ вальын. Мачрыроватык ытвэпы люур ыттъыёча ръэнут уэлетгъи. Тынвилгъэк, тыпирӄыгъэк, тытэӈгитэгъэн. Мэмылӄай! Мэрынрэ тычамэтаӈӈогъан, тынаймавыӈӈогъан гитэчьэтэ. Ӄэтэв ыттъыёча кээт, вэрӄаткот гатваленат, ынӄэната гымнан ытръэч эмлевыт нинэнъурэвэтигым. Лыгимэрынрэ тынэймэквъэн ырмич. Нэмэ тыгитэгъэн. Нийылӄэтӄин мэмылӄай гымыкагты вочвакы. Кааткынык тынтэнмавын, тыгэтачьыткоӈӈогъак, тъаччаӈӈогъан, титэ рэгъеквъэ, левыт рангырголявӈынэн. Колё нылиӈвитыткуйгым, рыпэт мэлытгылетыльын выегыргын. Эчги яальыпъыт рэлёӈӈонэнат-ым, ынкэӄэй лявтынгырголяквъэ. Ынкэӄэй тылӄэгнэвын, мэмылӄая люур левыт рэрэннин. Мэсӄэйыӄын тыгитэгъэн, нычимгъуйгым, вэчьым, люӈынпыткэвэ тынтыгъэн, лыгэн рэчыпъэтгъэ кагыргык. Ытръэч-ым наӄам пэнинэмил люӈилюльэтэ нитӄин. Ӄынвэр тыпэнрыгъан! Тыгитэгъэн, тэӈилюкэ нытваӄэн. Тымэмылёгъак, тэӈвытку! Миӈкри, рэӄэ мъэмэтын ытвэты? Итыкэвын нинэльуйгым мэмыльаматыльын ярагты ытлыгын. Ыныгмил мэмылен вэмылкэт тытранат, ричит ынкъам чакэттэн кычыквын тынъомравынат вэмылкэк ынкъам левтык. Ынӄо-ым коpгэты тъэмэтын, алымы ӄутти нэмэ мэмылтэ мачрыров ныровтытваӄэн. Ытвык пыкирык, чакыгэт гакоргавлен. Мэйӈыльыт амъянра нэмыӄэй ныпкирыткуӄинэт, ымыльорык эмӈирэют, амӈыроёт эмэтэ мэмылтэ ныныпкирэтӄинэт.

Ярак пыкирык ытльата ытлыгын айӈальатыӈӈонэн:

- Ийъам наӄам энантаӈынтэнмавкыльэгыт кымиӈын чайвытконвэты? Ымы эӈилгыкэ, ымы автычгыка гэчейвыткулин!

- Ӄэлюӄ-ым нычимгъуйгым, эты еп ныппылюӄин, ӄырым нинъэтэтгъэн. Чама ӈан чикинъэ гэлгитэӈилгытэвлин, рыпэт нэлгыпэраӄэн, рыпэт мэмыля люнльутэ рыннин, нэмэ нымӈэлюӄин ытлыгын. Этъопэл ынӄэн тэӈэмӄынинъэ нъылгитэӈилгытэвыркын инъыгъевык, ынӈин-ым ныкынтъэв ратваркын.



Alexandre Kerek

Le vieux morse


La mer était agitée. Le chef de l’embarcation dit à ses hommes :

- Il vaut mieux aborder dans cette petite baie. Par la mer nous ne passerons pas.

Les chasseurs de morses abondèrent dans son sens. La bande côtière, si l’on allait vers la crique, n’était pas éloignée. Aussi fut-on vite rendu. Après avoir bu le thé, on attela les chiens, et les hommes partirent le long de la rive en remorquant eux aussi la barque à l’aide d’un cordage. A terre on ne sentait pas le vent. Les chiens, bien reposés, progressaient rapidement. Un adolescent les suivait en courant par intermittence. Soudain le chien de tête, et après lui tout l’attelage, se mit au galop.

- Eh là ! Où courent-ils ainsi ? se demandèrent les hommes.

Tous se mirent à observer ce qui pouvait bien se trouver devant eux. Tout à coup, sur un petit cap de galets, ils aperçurent une sorte de monticule.

- Qu’est-ce donc ? interrogea le chef de l’embarcation, qui ajouta pour l’homme de proue : Tiens ton fusil prêt. On dirait que c’est une bête et que les chiens veulent se jeter sur elle.

- Freine l’attelage, dit l’homme à l’adolescent. Approchons-nous lentement.

Le jeune homme se saisit d’une corde et tenta de freiner les chiens, mais ceux-ci continuèrent de se ruer en avant. Ils ralentirent pourtant l’allure, bien qu’aboyant à qui mieux mieux. Le jeune les apostrophait sans crier et leur lançait des pierres car ils avaient fini par le faire sortir de ses gonds. Quand ils approchèrent de la bête, les chiens hurlèrent de plus belle, comme s’ils voulaient qu’elle se jette à l’eau. « Cela ferait pourtant de la bonne nourriture pour les hommes et les chiens », pensait le jeune homme.

Cependant la bête restait tout à fait immobile, comme si elle n’entendait pas les chiens. Elle ne levait même pas la tête pour les regarder.

- Mais qu’est-ce donc ? se demandaient les hommes avec curiosité.

- C’est probablement un morse. Mais que fait-il sur ce cap ? Regardez. On voit ses défenses blanches. Mais oui, c’est vraiment un morse.

Le vent apportait avec lui l’odeur de la bête. Les chiens continuaient de tirer de toutes leurs forces. Ils entraînaient la barque à toute vitesse vers le morse. Celui-ci ne bougeait toujours pas. Les hommes de la barque finirent par comprendre : l’animal était mort et avait été rejeté par la mer. En approchant du corps, les chiens s’apaisèrent. Ils paraissaient avoir senti que la bête ne fuirait pas, qu’elle ne se jetterait pas à l’eau et que, comme cela s’était déjà produit par le passé, elle serait pour eux l’occasion d’un bon repas. Une fois sur place ils flairèrent le corps, en firent le tour et, apaisés, se couchèrent. Les hommes mirent pied à terre et à leur tour examinèrent la bête.

- C’est un très vieux morse, un gros qitveïu. Ses défenses se sont raccourcies et émoussées. Il a le cou comme enflé.

- Pourquoi a-t-il été rejeté dans la lagune ? demanda le garçon qui avait conduit les chiens.

- Il a été entraîné vers l’embouchure de la crique par la marée, au moment de la débâcle. Il s’est probablement épuisé à lutter contre les courants et n’a pas pu ressortir en mer. C’était visiblement une très vieille bête. Regardez, son cou est couvert de blessures. En été, quand les morses se hissent sur la grève où la colonie se rassemble, ils se battent parfois pour une place, se frappant à coups de défenses. Le plus fort s’empare de la place du plus faible. Les blessures guérissent, mais la peau de leur cou, de leur dos et de leur tête se couvre de kystes qui grossissent avec l’âge. On appelle ce genre de morses des qitveïu. Quand ils vieillissent, ils meurent et sont rejetés à terre, ou bien ils sont tués en mer par les ours blancs ou les orques.





Ӄитвэю

Аӈӄы нэйычгэтӄин. Ы'твэрмэчьэ гыннигӈыттыльыт ивнинэт:

- Опопы вынэ мынъытырмэмык ӄоймагты, чамъам аӈӄаеквэ – а'ӄатыляӈ.
Ымыльо вэтгыры вагъат. Аӈӄайпы ӄоймагты тапъаеквэ тылян ивлыкыльу гитлин, ынӄэната пэтле ы'тырмэгъат.

Чаёплыткок нэкылгэтынэт ы'ттъыт ынкъам ы'твыльыт укымъутэ эквэтгъэт ӄоймачормата. Ӄуйым нылгитымгэтӄин. Таӈпаӈъэвӈытольыт ы'ттъыт ныръилемъетӄинэт. А'ачек ырык яалеӈӄач мэчынкы минринэтэ ныркычавычьатӄэн. Мэсӄээӄын вак люур янотъыттъын, ынык-ым рээн ымыльо гаканъё, пэӄыткутэ нъэлгъэт.

- Рай-рай, ръэнут напэнрыгъан? – пынлёӈӈогъат ы'твыльыт.
Ымыльо ы'ттъыёлягты гынрыратыӈӈогъат. Люур чыгайӄытрыӄайык ы'ттъыёча вытрэтгъи о'птыма тынупӄэй.

- Ръэнут рай? – ӄолентогъэ ы'твэрмэчьын, ынкъам ръэрильын ивнин, - а'тав вынэ мэлгынник. Ы'ттъыт малпэнрыткольыт.

- Вынэ ӄыръарэӈгын гаканъё, - ивнин ынан а'ачек, - мэрынрэ мынынэймэвын.

А'ачека укымъулгын пиринин ынкъам а'рэӈӈонэнат ы'ттъыт, ытръэч-ым панэна лыгэн гаканъё ы'ттъыёлягты нытэгъэнтилӄин. Итыкэвын-ым ы'ттъыт мэрынрэ э'рамъятыӈӈогъат, ытръэч-ым ынраӄ тавтаватыльатыӈӈогъат. А'ачека мэрынрэ нэнаӄолентоӄэнат, чама выква нэнавылгыпӄэнат, ӄэлюӄ-ым лыгэн лыгъымӈычвыно нинэлгыӄинэт: гэнэймэвлин гынник, наӄам тавтаватыльатыркыт, ӄынур нарантавӈыркын мэмлеты.

Тэйӈэту, рэӈу лынъёлӄыл гыннэкычгын, - нычимгъуӄин а'ачек.
Наӄам гынник лыгэн нытаӈолвытваӄэн, ӄынур ванэван нывалёмнэн ы'ттъытавтав, ымы алявтынгырголявка нитӄин эмрэллемӈэ.

- Лыгиръэнут ытлён? – ныпэгчиӈэтӄинэт ы'твыльыт.

- Лыгималрыркы, наӄам иа'м ӄуймэк? Ӄыгитэ-ым ӈаан малваӈӄыттэ элгыпэраркыт! Како, ынӄэн ӄэйвэ рыркачгын!

Ныгтийгатӄэн рыркаӈӄачайпы, ынӄэната ы'ттъыт тэпэнинэӈэ нытгымэтӄинэт, нынйыӄытчовӄэн ы'твъэт гыннэкыӈӄачагты. Рыркы-ым лыгэн пэнинэмил илюкэ ныровтытваӄэн. Ӄынвэр ы'твык вакъотвальыт чичеквъэт: нэльугъэн номыльын рилльу. Тэӈэймэвкы рэлльогты наӄамлым гаканъё унтымэквъи. Ы'ттъыт ӄынур чичеквъэт: ӄырым ныгынтэквъэн, нымимлылӄэтгъэн гынник, ӄэйӈун лыгэн роолӄылё ритгъэ, рэӈу. Пыкиринэӈу ы'ттъэ рилльу найӈоткоӈӈогъан, накамлелтагъан, тэӈунтымэвык-ым лыгэн рылгалгъат.

Ынкэӄэй ы'твыльыт нэмыӄэй ӈыпэгъэт, нагэтаӈӈогъан номыльын.

- Колё пэтырыркы, ӄэтваёчгын. Ваӈӄыттэ рыпэт гэчивмытвилинэт, гэвылӄэтлинэт, и'тын ӄынур гэпээтлин.

- Наӄам и'ам ганомлен ӄынмаӈӄак, - пынлёгъэ а'ачек, ы'ттъыркылельу итыльын.

- Ӈан-ым ӈан этьыманы гэлгаляӈӈок кэтэм эмлянма рэсӄиквъи пэлгэпы ӄоймагты. Этьыманы вай чама гэмэчрултывилин ынкъам пыльыляйгыпы лываквъэ нэмэ аӈӄагты ӈыток. Ӄэлюӄ-ым вай колё гэнпэвлин. Ӄыгитэгыткы – и'тын рыркэн лыгэн мыкатынвыльын. Ынӄэн элекин ровтынвык, миӈкы нумэкэтӄин нымкъэв рыркамкын, ӄол нитӄинэт рыркат ванвык ныркурӄинэт ынкъам ваӈӄыта ниттилыткучитӄинэт. Армаӈ вальа ролыӈ вальын нэнаванвоӄэн. Атынвыт итык нымэлевӄинэт, ытръэч-ым нэлгын и'нныкин, ӄэптикин, левтыкин ӄынур ныкукъунӈэӄин, ръэнутэт ынпавма мыкыӈ нынъэлӄинэт. Ынӈин вальын рыркы ӄитвэюну нылгыӄин. Ынпэвык ынӈин вальыт рыркат чинит раквачата нитӄинэт ынкъам ныномӄэнат, мэӈинрин аӈӄак умӄэтэ лымэвыр и'ӈыпчиӄэ нынмыӄэнат.